Le 14/07/2020

Conscience : ce que la plupart des scientifiques ne comprennent pas #0243



Dans cet épisode on parle de philosophie métaphysique et du problème difficile de la conscience.

Bonjour et bienvenue,

c'est Bertrand de la Fondation MAGister,

l'École des Héros du Monde Réel.

...

Dans l'avant dernier épisode j'ai commencé à vous parler de la différence entre la conscience et le fait d'être conscient.

Autrement dit la différence entre l'expérience et la meta-cognition.

Et aujourd'hui on va parler de la confusion que la plupart des neuroscientifiques ne comprennent pas à propos de la conscience.

Cette confusion c'est la confusion entre le contenant et le contenu.

Ou dit autrement la confusion entre le conteneur et le contenu.

Les perceptions ne sont pas l'écran de la perception

En effet la plupart des scientifiques et philosophes matérialistes qui expliquent la conscience et les fonctions de la conscience,

en fait ils n'expliquent pas la conscience et ses fonctions,

mais ils expliquent le contenu de la conscience et les fonctions de ce contenu.

Ce qui est très très différent.

Grosso-modo le contenu de la conscience ça renvoie à ce que moi j'appelle la perception existentielle et l'encapsulation de la conscience.

À savoir des systèmes et des mécanismes de survie en gros.

Mais l'encapsulation de la conscience n'explique en aucun cas la conscience.

Elle explique la forme restreinte et pragmatique de la conscience.

Et cette forme restreinte ça correspond à des modélisations et des représentations symboliques et simplifiées du monde, de la vie, de soi, des processus qui se passent dans notre organisme.

Qui masquent la complexité et ne laissent apparaître que ce qui est pragmatique pour l'existence.

C'est ça le contenu de notre conscience.

Et la fonction de ce contenu c'est en gros d'imager la réalité de manière simplifiée de telle sorte à pouvoir orienter et guider plus facilement notre existence.

C'est comme une interface utilisateur qui grossièrement permet d'augmenter et d'améliorer notre survie.

Et effectivement c'est le cerveau qui est responsable de l'encapsulation de la conscience.

Si on modifie le cerveau cela change l'encapsulation de la conscience.

...

Et donc pour résumer, en ayant expliqué ça de manière détaillée,

beaucoup de penseurs pensent avoir expliqué la conscience.

Alors qu'encore une fois non, ils ont juste expliqué le contenu de la conscience et les fonctions de ce contenu.

Pire encore certains penseurs affirment que la conscience est une illusion sur la base de cette explication.

L'illusion de la conscience, vraiment ?

Parce que comme dans cette définition le contenu de la conscience n'est pas une image objective du monde extérieur et des processus de notre organisme, mais une image simplifiée qui masque la complexité, une interface utilisateur,

alors ce contenu n'est pas vraiment ce qu'il représente,

et donc c'est une illusion.

...

Mais l'ironie c'est que pour avoir une illusion il faut avoir de la conscience.

Une illusion ne peut pas exister par elle-même, ça n'a aucun sens.

Par exemple je vous répète souvent que l'Ego est une sorte d'illusion.

Notamment dans l'explication de l'épisode 235.

Mais si on peut dire que l'Ego une illusion c'est parce que notre conscience peut développer un autre point de vue pour contraster et révéler cette illusion.

Une illusion ne peut pas exister par elle-même.

C'est ce que je vous expliquais dans l'épisode 116.

Une illusion est une apparence qui n'est pas ce qu'elle semble être.

Mais une apparence illusoire reste une apparence.

Paradoxalement une fausse apparence est une vraie apparence.

Et donc il faut bien que cette apparence qu'elle soit illusoire ou pas, apparaisse à quelque chose.

À qui apparait cette apparence ? Au cerveau ? Aux neurones ? Aux atomes ?

Non, c'est à la conscience.

Autrement dit s'il semble y avoir quelque chose mais qu'en fait il n'y a rien,

eh bien il y a quand même la semblance.

Et par conséquent même en retirant notre Ego qui n'est pas ce qu'il semble être,

il nous reste la conscience a qui apparait cette semblance.

Car encore une fois ce n'est ni le cerveau, ni les neurones, ni les atomes a qui cela semble qu'il y a quelque chose.

Une illusion reste une expérience de la conscience.

...

Le problème difficile de la conscience

Bref, si vous m'avez suivi alors vous comprenez bien que discuter de la nature illusoire ou pas du contenu de la conscience ne concerne et n'explique en aucun cas la nature illusoire de la conscience en elle-même.

On s'en fout du contenu.

On s'en fout que ce contenu soit vrai, illusoire, réel, fictif, ou peu importe.

On s'en fout.

Ce qu'on veut comprendre c'est pourquoi ce contenu est accompagné d'une expérience, de sensations, etc.

Pourquoi quand on a de la douleur, il n'y a pas juste la fonction et les comportements associés à la douleur mais également des sensations.

Pourquoi ce n'est pas juste purement mécanique et inconscient, dans le sens sans sensations ni expériences subjectives.

Pourquoi y a-t-il quelque chose et non rien.

Dans les termes du philosophe Thomas Nagel, pourquoi cela fait quelque chose d'être nous et de vivre notre vie.

Pourquoi on est là pour vivre et voir notre vie.

Pourquoi notre vie ne se déroule-t-elle pas mécaniquement sans passager.

Parce que vous savez on peut construire des robots qui modélisent et reconnaissent la réalité de manière simplifiée et interactive pour pouvoir se guider consciemment,

cette modélisation ne sera pas pour autant accompagnée de conscience.

On en revient à la distinction dont je vous parlais dans le précédent épisode  entre la conscience et être conscient.

Autrement dit la distinction entre l'expérience et la meta-cognition.

La meta-cognition étant en gros le fait d'être conscient d'avoir conscience.

Ce que l'expérience fondamentale n'a pas.

...

On peut par exemple faire des robots qui ont la fonction de la douleur sans l'expérience de ressentir la douleur.

Donc la fonction générale du contenu de notre conscience, cette fonction de représentation et de guidage, elle n'implique pas la conscience, c'est à dire les sensations expérientielles.

On peut même imaginer que dans le futur on puisse créer des robots ayant l'apparence humaine, et se comportant de l'extérieur exactement comme un être humain,

mais qui a l'intérieur n'ont en fait aucune conscience de ce qui leur arrive, aucun écran intérieur, aucune sensation expérientielle.

Un peu comme un personnage dans un dessin animé.

Quand on regarde un dessin animé, pour nous le personnage du dessin animé semble vivre et ressentir des choses, mais techniquement c'est juste de la fiction.

L'expérience du personnage, tout ce qu'il semble ressentir c'est en fait nos expériences.

Ce n'est pas que ça n'existe pas, mais c'est que c'est notre conscience à nous qui a ces expériences et qui les projettent comme étant les expériences du personnage.

C'est à dire que si on lance le dessin animé mais que personne ne regarde, alors les personnages du dessin animé ne vont pas avoir d'expérience.

L'expérience dépend des humains qui regardent le dessin animé.

Si je mets la caméra de mon smartphone à enregistrer le dessin animé, mon smartphone ne va pas pour autant avoir d'expérience du dessin animé.

...

Pourquoi il y a de l'expérience et non rien, c'est ce que David Chalmers a appelé le problème difficile de la conscience.

En opposition aux problèmes faciles, à savoir d'expliquer le contenu de la conscience et les fonctions de ce contenu.

Encore une fois pour comprendre le mystère de la conscience, on s'en fout du contenu et de ce qu'il fait.

Peu importe le contenu, ce qu'on veut comprendre c'est pourquoi ce contenu est accompagné d'expérience.

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Le problème difficile de la conscience est également appelé le problème corps esprit.

Comment la matière peut-elle produire la conscience ?

Énoncé dans le paradigme matérialiste, le problème difficile de la conscience devient : comment la matière, organisée d'une certaine manière peut-elle produire de la conscience, des affects, des sentiments, de la mentation, et compagnie ?

Parce que dans le paradigme matérialiste on présuppose qu'à la base de l'univers, il n'y a que de la matière, et que tout le reste y compris la conscience et le mental, émerge à partir de la matière.

Mais bien sûr ce problème troublant n'existe que si on se place dans le paradigme matérialiste.

Il n'a pas lieu d'être dans les paradigmes idéalistes et dualistes.

Pour info, le paradigme idéaliste présuppose qu'à la base de l'univers, il n'y a que de la conscience ou que de l'esprit ou que du mental, et que tout le reste, y compris la matière, émerge à partir de la conscience.

Grosso-modo comme dans une sorte de rêve.

Quand vous rêvez, le monde matiériel dans lequel vous semblez être est en fait une sous-partie du mental.

...

Le paradigme dualiste quand à lui présuppose qu'à la base de l'univers il y a les deux, de la matière ET de la conscience immatérielle.

Dans les paradigmes dualistes il y a deux choses à la base de l'univers.

Dans les paradigmes monistes, il y a une seule chose.

...

Personnellement je me situe également dans un paradigme moniste, comme le matérialisme et l'idéalisme.

C'est à dire que pour moi à la base de l'univers il n'y a qu'une seule chose et tout émerge de cette unique chose.

Mais cette chose fondamentale n'est ni la matière, ni la conscience, ni l'esprit.

Non c'est quelque chose d'innomable, quelque chose de neutre, qui n'a absolument aucune qualité et en même temps toutes les qualités possibles.

C'est le Vide en tant que réservoir de l'Infini.

On peut aussi appeler cette base le Tout avec un grand T, l'Etre avec un grand E, ou l'Existence avec un grand E.

Ou ce que j'appelle plus généralement Dieu.

Tout ça c'est synonyme pour moi.

Finalement ce paradigme neutre est proche de l'idéalisme et du matérialisme mais il reste sensiblement différent et plus épuré.

Je ne vois personnellement aucune raison d'appeler la base de l'univers la matière ou la conscience.

Ces termes sont hyper chargés de sens et biaisent clairement notre perception et notre raisonnement sur l'univers.

Le mot "matière" est rattaché à plein d'autres qualités physiques.

Et le mot "conscience" est rattaché à plein d'autres qualités spirituelles et mentales.

Ce ne sont pas des concepts épurés.

Et toute cette charge sémantique et conceptuelle mène inévitablement à des confusions.

...

De plus dans le paradigme matérialiste on présuppose qu'à partir de la matière, on peut produire tout ce qui existe, y compris la conscience.

Mais du coup si de la matière peut devenir de la conscience, comment être sûr que la matière n'est pas elle-même à la base quelque chose de différent qui est devenu de la matière ?

Autrement dit, si la substance à la base de l'univers peut radicalement se transformer et se transcender, comment savoir comment elle était vraiment à la base ?

Si elle peut faire des bonds aussi grands que de matière à conscience, qui peut nous dire quels genre de bonds elle a pu faire dans le passé avant d'être ce qu'elle semble être maintenant ?

C'est ce genre de questionnements qui me font avoir une position plus neutre et épurée.

...

Bref, du coup pour info on appelle ce type de paradigme moniste neutre auquel j'adhère,

du monisme neutre, tout simplement.

C'est également très proche du monisme dualiste ainsi que de la théorie du double aspect.

Mais je ne vais pas rentrer dans les détails à ce propos ici.

...

Dans ce paradigme neutre, la matière est juste une subdivision particulière et pratique de l'Etre,

qui a notre échelle d'être humain est relativement stable.

D'où la sensation d'un monde objectif externe fait de matière.

Même si au final la substance fondamentale de cette matière est la même que disons, la substance de l'imagination.

Encore une fois c'est juste une question d'échelle.

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L'attrait intuitif du matérialisme

Pour terminer je dirais juste que l'attrait et la dominance du matérialisme est intimement connectée à la perception existentielle.

Notamment cette intuition que la matière est plus vraie, plus tangible que le reste.

On a besoin d'avoir un ancrage conceptuel de l'existence et comme la matière est associé à des sensations dures et solides,

elle est le candidat idéal pour cet ancrage conceptuel.

Mais étant donné que cette intuition et ces sensations découlent d'une perception qui elle n'est pas tangible et matérielle, le serpent se mord la queue.

Les sensations de solidité et de dureté de la matière sont purement mentales.

Si on manipule le cerveau il est techniquement possible d'avoir des sensations de mollesse et d'intangibilité quand on est au contact de la matière.

Et si c'était le cas je suis certain qu'on aurait jamais eu l'idée de penser que la matière puisse être le fondement de l'univers.

Parce qu'implicitement on veut un fondement solide.

On ne va pas construire une maison sur des sables mouvants.

Même quand cette maison est métaphysique.


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