Bonjour et bienvenue,
c'est Bertrand de la Fondation MAGister,
l'École des Héros du Monde Réel.
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Dans les quatre derniers épisodes on a commencé à parler de l'opposition entre les personnes de nature introvertie et les personnes de nature extravertie.
Je vous disais que même si je pense que cette opposition existe bel et bien,
elle a tendance à être hyper-exagérée et à être détournée et utilisée comme prétexte pour justifier différents problèmes qu'on peut avoir,
et qui en fait sont indépendants de tout ça.
L'un des gros problèmes que j'ai avec le concept d'être une personne introvertie,
c'est que c'est souvent une sorte d'excuse et de ruse inconsciente pour se voiler la face et éviter de se confronter à nos limites et à nos développements immatures,
et pour faire passer ces limites et ces développements immatures comme des qualités.
À partir du moment où tu te dis que tu es une personne introvertie,
que ça fait partie de ta nature, c'est comme ça, tu l'as accepté,
eh bien tu n'as plus besoin de faire face à tes lacunes niveau extraversion,
parce que ça devient logique que tu sois comme ça.
Ce n'est pas vraiment des lacunes, c'est juste que c'est ta nature,
tu es comme ça, tu es introverti, tu ne peux rien y faire.
Ça coupe toute négativité associée à ces lacunes.
Ainsi, avoir l'identité d'introverti est souvent une identité compensatrice qui couvre une identité déficiente.
Parce qu'on a commencé à développer un identité déficiente et que c'était inconfortable,
on a a développé par dessus une identité compensatrice.
En gros c'est un peu l'histoire de mettre la crasse sous le tapis.
C'est une chose d'accepter qu'on est introverti,
mais hélas notre Ego en profite pour faire passer clandestinement tout un tas d'excuses.
Autrement dit ce concept d'être une personne introvertie est souvent une forme de contournement,
une forme de déni permettant de normaliser et rationaliser certaines lacunes développementales.
En fait c'est très similaire à ce qu'on appelle le contournement spirituel, ou “spiritual bypassing” en anglais.
Vous savez, l'image stéréotypique du maître spirituel,
c'est une personne qui est détachée des désirs et des besoins matériels, égoïques et primitifs,
une personne qui est au dessus de tout ça, une personne qui est relativement détachée de la société,
une personne qui est équanime, c'est à dire qui est stable émotionnellement, qui ne se laisse pas affecter par les événements extérieurs.
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Eh bien il y a plein de personnes qui se croient avancées spirituellement sous prétexte qu'elles sont détachées de la société, qu'elles ne pourchassent pas de buts classiques, qu'elles ont peu de désirs, qu'elles sont détachées du matériel, et qu'elles ne réagissent pas aux évènements de la vie.
Elles croient qu'elles sont au dessus de tout ça.
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Alors que souvent la vérité c'est que là aussi on a une identité compensatrice qui couvre une identité déficiente.
C'est à dire qu'au fond, ces personnes sont blessées et sont dans une forme de dépression.
Ce sont des personnes qui ont réprimé tellement d'émotions qu'elles sont bourrées de blocages et ne ressentent plus rien.
Ce sont des personnes qui négligent les aspects de la vie qu'elles n'ont pas le courage de travailler.
Ce sont des personnes qui sont apathiques, engourdies et atoniques,
des personnes qui se sont résigné et qui ont abandonné sans se l'avouer l'idée d'atteindre des buts et de réussir leur vie, des personnes qui vivent dans une forme de torpeur.
Ce qui donne l'illusion de l'équanimité spirituelle.
Ce n'est pas qu'elles ont délibérement choisi de se détacher des buts et des désirs communs,
c'est que même si elles le voulaient elles se sentent incapables d'y arriver.
Il y a une forme de résignation inavouée.
Parce que c'est plus facile de se dire qu'on est désengagé par choix que par incapacité de s'engager.
Et je crois que beaucoup de personnes qui se conceptualisent comme des introvertis sont dans une situation similaire.
Ils n'ont pas bien développé la part extravertie de leur personnalité quand ils étaient enfants et adolescents, ils sont très immutures et dépassés à ce niveau,
ils sont perdus,
et donc ils se retranchent et ils rationalisent leur état à travers le concept d'être une personne introvertie qui n'est juste pas faite pour ça.
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Et si je vous dis tout ça c'est parce que moi dans ma vie je l'ai vécu comme ça.
À une période de ma vie, j'avais complètement négligé la dimension sociale de la vie.
J'avais tout misé sur les projets personnels.
Et avec le recul, c'était tellement évident aussi que j'allais me taper des soucis durs à gérer au niveau sentimental et relationnel.
Parce que à cette époque c'était encore un domaine où j'étais immature et je ne croyais pas du tout en moi, sans me l'avouer.
De mon point de vue je ne croyais pas dans les gens, j'étais misanthrope, je pensais que je ne pouvais que perdre mon temps à les côtoyer.
Mais en fait ce que je ne réalisais pas,
c'est que ce n'est pas que je ne croyais pas dans les gens,
non, c'est que je ne croyais pas en moi.
Je ne croyais pas en ma capacité d'avoir de bonnes interactions avec les gens.
Depuis toutes ces années je m'étais progressivement mis en tête que ce n'était pas pour moi tout ça, que je n'étais pas fait pour, et que j'allais en rester éloigné toute ma vie.
Je m'étais mis en tête que j'allais absolument tout réussir tout seul dans ma vie à la force de ma détermination.
Je m'étais construit cette identité du solitaire pur et dur.
Et je m'étais convaincu que c'était uniquement par choix que j'avais cette direction.
Je pensais que j'étais tellement au dessus de toutes ces relations superficielles.
Mais la vérité c'est que c'était par confort que j'évitais tout ça.
Parce que même si je le voulais je n'avais pas les compétences pour.
Donc c'était un mécanisme de défense confortable de me dire que je n'en voulais pas et que j'étais au dessus.
Ça m'évitait de réaliser que j'en étais incapable.
Ça m'évitait de casser mon image de moi.
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Et c'est important ce que je vous dis là.
Ne sous-estimez pas la puissance des mécanismes de défense de notre ego.
Ça peut aller très très loin pour protéger notre réalité interne, notre image et nous empêcher de réaliser certaines choses qui nous ferait souffrir.
Par exemple après certaines lésions cérébrales,
certaines personnes peuvent se retrouver paralysées d'un bras ou d'une jambe
et être convaincues à 100 % que si elles ne bougent pas leur membre,
c'est simplement parce qu'elles n'ont pas envie.
Tout ça pour ne jamais réaliser la terreur qu'elles sont paralysées et qu'elles sont incapables de bouger leur membre même si elles en avaient envie.
Ça paraît absurde et pourtant c'est réel.
Et si vous voulez en savoir plus à ce propos je vous conseille les livres "le fantôme intérieur" et "The Tell-Tale Brain" du neuroscientifique V.S. Ramachandran.
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Bref, la vérité c'est que subconsciemment à cette époque j'en avais peur de tout ce domaine des relations sociales.
Peur d'être confronté à mes incapacités à ce niveau.
Ça me dépassait complètement, j'étais perdu.
Et au fond je pensais que c'était inchangeable.
Et donc pour me protéger et éviter de réaliser que j'en étais incapable,
et me retrouver dans l'inconfort d'avoir conscience de tout ça,
je m'étais complètement fermé et encapsulé,
et j'ai projeté la faute de mon désengagement sur le manque d'intérêt des autres.
Je veux dire si tout s'était bien passé au niveau social dans mon passé,
mais je n'aurais jamais été mené à faire ce choix de vivre seul et de me créer cette identité.
Croire que c'était un choix délibéré, c'était vraiment naïf.
Je m'étais juste fait conditionné bien profondément à faire ce choix parce qu'un moment je n'ai pas réussi à m'intégrer comme je voulais,
je n'ai pas réussi à exprimer mes sentiments, m'épanouir et avoir les expériences dont j'avais envie,
que ça m'a causé des tas de blocages et d'inhibitions qui étaient toujours actifs
et qui me faisaient croire que cette espèce de froideur, de désengagement social et d'introversion c'était mon état naturel.
Alors que c'est du bullshit, parce qu'au début de ma vie, j'étais vraiment pas si mal socialement.
J'avais pas mal d'amis très proches, je riais beaucoup, j'adorais faire rire les autres, je délirais et faisais le con genre tout le temps.
J'étais loin d'être désengagé socialement.
Et si j'avais gardé cette attitude et cet engagement, le déroulement de ma vie n'aurait eu rien à voir.
C'est en cours de route que ça a dérivé, que je me suis bloqué et désengagé, que tout ça a disparu, que j'ai commencé à me prendre beaucoup trop au sérieux,
à me créer cette image froide et introvertie de laquelle je ne m'autorisais plus de dévier,
et que j'ai oublié comment j'étais avant.
Je ne m'en étais pas rendu compte mais avec l'âge j'étais devenu hyper rigide, hyper fermé, froid, introverti, peu expressif, ennuyant, exigeant, critique, je ne rigolais plus jamais, je ne déconnais plus jamais.
Et un moment donné je l'ai réalisé ; j'ai réalisé que je n'étais pas du tout comme ça à la base,
et qu'en devenant adulte j'avais perdu plein de traits de personnalité que j'avais quand j'étais enfant.
Et je me suis dit bordel qu'est-ce que la vie m'a fait !
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Quand on se lance dans le développement personnel,
On peut avoir du mal à croire que passer des années à dériver dans une direction positive va pouvoir nous changer.
Mais la vérité c'est que ça nous est souvent déjà arrivé, et pas forcément dans la bonne direction.
Et pour ça il suffit de se reprojeter tout ce qu'on faisait quand on était enfant
et qu'on ne fait plus maintenant.
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Un moment donné, j'en suis arrivé à un point où ça faisait 5 ans que je n'avais eu aucune relation digne de ce nom, même amicale.
J'avais des interactions bien sûr,
mais j'évitais les gens, je réduisais mes interactions au strict nécessaire, je ne cherchais jamais à approfondir.
Ce qui de toute évidence, n'est pas bon pour la santé mentale.
J'avais des gros sauts d'extraversion de temps en temps quand j'étais dans de nouveaux contextes avec des personnes que je connaissais peu,
mais je revenais assez vite à mon centre de gravité quand je quittais ces contextes.
Ces sauts d'extraversion n'avaient pas d'ancrage pour se maintenir, au contraire.
Aussi depuis des années et des années, je faisais assez régulièrement des rêves très fleur bleue et plus ou moins dramatiques dans lesquels il y avait une fille pour laquelle je ressentais des sentiments hyper-forts.
Mais dès que je me réveillais je les oubliais.
Ces rêves me faisaient déprimer, ils m'affaiblissaient.
Je les considérais comme des fantasmes naïfs complètement en décalage avec la réalité qui ne faisaient que me torturer l'esprit.
Je me disais que c'était mon besoin d'amour qui fuyait au seul endroit là où il pouvait s'exprimer,
à savoir dans les rêves.
Mais que dans la réalité ça ne marchait pas comme ça,
les filles comme ça n'existe pas.
C'était juste de la projection.
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J'étais devenu vraiment fermé aux autres et intolérant à l'idée que je pourrais bien m'entendre avec qui que ce soit.
Je gardais mes distances avec tout le monde.
À ce niveau j'étais enfermé dans une vision distordue que mon ego justifiait pour se protéger.
Cette croyance que les gens ne valaient pas la peine que je leur porte attention parce que je suis fondamentalement incompatible avec, qu'ils sont trop superficiels, etc
Cette croyance faisait partie de mon encapsulation existentielle.
Mon ego avait développé cette croyance pour me protéger car au fond je me pensais incapable de réussir avec les gens, même si je le voulais.
Autrement dit c'était juste une forme de protection indirecte.
Comme je vous l'expliquais dans les épisodes 65 et 67, nos convictions sont bien souvent des protections non assumées.
J'avais soit-disant décidé de ne pas m'occuper des relations humaines.
J'étais concentré à fond sur moi et sur mes objectifs.
Je m'étais fait à l'idée que ça n'en valait pas la peine et que j'allais rester seul toute ma vie.
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Mais plus tard j'ai réalisé qu'en fait tu ne décides pas de ce genre de choses.
Un beau jour j'ai croisé une fille, je ne l'avais pas prévue et elle a complètement foutu en l'air le plan de mon ego.
Au début je m'en foutais comme de tout le monde ;
tout le monde était invisible pour moi à cette époque.
Mais petit à petit j'ai remarqué qu'elle attirait un tout petit peu mon attention.
C'était assez subtil, mais avec le recul c'est là que mon armure à commencer à craquer.
Avec le temps qui passe ça a pris de l'ampleur,
comme s'il y avait une petite graine qui était plantée dans ma tête et qui prenait racine.
Plus j'en découvrais sur elle plus elle m'attirait.
Ce qui n'est pas du tout fréquent chez moi.
Je peux facilement me faire attirer par des belles filles c'est sûr,
mais c'est hyper superficiel et volatile, ça a très peu de force sur mon esprit.
Je suis très difficile.
J'oublie les gens très facilement.
Dans 95 % des cas, il n'y a pas la personnalité et l'esprit derrière pour retenir mon intérêt.
Et elle elle avait tout, l'intelligence, la beauté, le caractère, etc, j'étais sur le cul.
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Bref, clairement je n'avais jamais croisé une fille comme ça, je ne pensais même pas que ça existait.
Et assez rapidement elle m'est devenu complètement irrésistible,
mon petit esprit n'était juste pas prêt haha
Elle me faisait complètement sortir la tête du guidon de ma petite capsule de conscience.
Dans ma tête j'étais en mode "merde... elle me plaît vraiment bien celle-là."
Je sentais les turbulences venir au loin.
J'ai ressenti une énorme dissonance cognitive.
Elle a réveillé tous les désirs qui étaient éteints depuis longtemps.
C'était devenu intenable de garder ma vision de la vie en mode solitaire.
Je me sentais misérable de travailler sur mes objectifs dans mon coin, avec ces désirs intenses allumés en moi.
Quand j'y repense c'est assez fou ce qu'une personne peut faire à la trajectoire de notre vie.
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Et c'est à partir de là que me suis bien rendu compte que je me bernais depuis des années avec ma vision superficielle et réductrice des gens.
C'était juste pour me protéger.
Je ne suis pas assez con pour ne pas voir les pièges de ma propre psychologie.
D'autant plus que le réveil que ça a provoqué en moi m'a fait réaliser que depuis quelques temps je n'étais plus à fond,
j'étais en train de partir à la dérive,
j'étais en train de perdre ma détermination à petit feu.
J'étais dans une sorte de semi-dépression en fait, à moitié éteint.
Parce que le contact social il n'y a pas à chier, c'est l'un des trucs qui nous maintient pleinement en vie.
On peut ne vivre que pour soi, mais on peut difficilement ne vivre que pour soi et être pleinement en vie.
Ta santé, ta richesse, tes relations, ta vocation
Quand l'un de ces quatres éléments est très bas ou n'avance pas dans la bonne direction,
c'est très difficile d'être pleinement heureux et engagé dans la vie.
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Et ça a marqué le début d'une sacrée tempête de chaos émotionnel dans ma vie.
Je gardais tellement bien enfoncé profondément dans les cachots de mon subconscient tous les traumas associés à mes sentiments,
que quand c'est sorti, ça a fait des dégâts.
Mais des dégâts dont j'avais besoin pour me détruire et me restructurer.
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Personnellement ce choc m'est arrivé à ce moment par hasard,
sans que je cherche à le contrôler,
mais si on devient plus conscient, on peut être proactif.
On peut arrêter de faire l'autruche et anticiper les choses qui ont besoin d'être secouées dans notre vie.
On peut anticiper les problèmes qui vont s'aggraver et ne pas aller en s'arrangeant avec le temps.
Et faire en sorte de provoquer ce choc le plus tôt possible.
Faire en sorte d'augmenter les probabilités que ce choc arrive et nous déstructure.
Le plus tôt ça arrive, le mieux c'est.
Parce que le plus tôt on se sera restructuré.
Maîtrisez votre esprit, développez votre conscience, élevez votre existence !